Prix de l'azote : 15 moyens de réduire sa facture d'engrais
27 nov. 2021 19:11:00
Fabriquer des engrais azotés demande beaucoup d’énergie, principalement sous forme de gaz naturel. Le prix de ce dernier compte pour 80% du prix de l’azote. Alors quand le prix des hydrocarbures atteint des sommets et que la demande mondiale en engrais azotés s’emballent, le marché des engrais flambent et les agriculteurs français s’inquiètent et cherchent à réduire leurs charges et peuvent être tentés de diminuer le recours à l’azote, au risque parfois de mettre en péril leur futur chiffre d’affaire.
Nous vous proposons 15 astuces qui vous aideront à diminuer vos charges de fertilisation minérale et préserver votre rentabilité de votre exploitation sans mettre à mal le potentiel de rendement de vos cultures.
SOMMAIRE
- Faire des reliquats sortie hiver plus profonds
- Calculer l'impact de la variété
- Fractionner ses apports au maximum
- Modulation intraparcellaire selon l'hétérogénéité
- Moduler l'engrais selon sa forme
- Epandre dans les bonnes conditions météo
- Valoriser les engrais organiques
- Rechercher l'optimum technico-économique
- Eviter les autres facteurs limitants
- Les impasses, oui, mais pas n'importe comment
- Implanter des CIPAN
- Intégrer des légumineuses dans la rotation
- Investir dans la pesée embarquée
- Valoriser la coupure de tronçons et gestion des pointes
- Optimiser les réglages de l'épandeur
1. Des reliquats sortie hiver plus profonds
Bien faire ses reliquats sortie hiver permet d’espérer un écart de 15 unités d’azote supplémentaires, ce qui couvre largement le surcoût lié à une analyse plus profonde.
Souvent réalisés dans les premiers 30 cm du sol pour des raisons de coûts et de simplicité, les prélèvements de terre réalisés pour la mesure des reliquats sortie d’hiver (RSH) sous-estiment la quantité d’azote disponible dans le sol. Ce qui revient à majorer l’apport dans le calcul de la dose prévisionnelle d’azote.
Il ne faut donc pas hésiter à faire des mesures dans un horizon du sol plus profond (jusqu’à 60 cm, où l’azote reste disponible pour les racines), et le plus tôt possible pour limiter l’impact de la météo hivernale.
2. Calcul du plan prévisionnel de fumure : tenir compte de la variété avec le besoin « b »
Certaines variétés de blé sont moins gourmandes en azote que d’autres. Le calcul de votre dose prévisionnelle d’azote à apporter sur les céréales à paille doit donc tenir compte des besoins en azote de la variété cultivée (il peut également dépendre du débouché visé ou de la zone de production)
Arvalis fournit pour chaque variété un besoin unitaire « b » associé. Il faut en tenir compte dans le calcul de votre PPF. Selon la variété de blé, ce besoin b varie entre 2,8 et 3,2 kg d’azote par quintal produit.
Si on se base sur le rendement moyen national de 2021 à 73 q/ha pour un blé tendre, l’effet variété peut représenter jusqu’à 36 unités à l’hectare.
Besoins unitaires en kilogramme d'azote par quintal de grain, selon l'espèce de céréales et l'objectif de production (©Arvalis-Institut du végétal)
3. En blé, fractionner ses apports au maximum
A doses égales, le fractionnement en quatre apports sur blé est plus efficace qu’une stratégie de fertilisation azotée en trois apports.
D’après Arvalis, pour des doses totales supérieures à 200 kg/ha d’azote, on peut espérer un gain de 0,5 q/ha et une augmentation de 0,2% de protéines.
Cette stratégie en 4 apports consiste à réaliser le second apport, en deux fois, avant et après le stade épi 1cm. Cet « encadrement » du stade épi 1cm peut toutefois ne pas être possible si les conditions météorologiques sont limitantes.
4. La modulation intra-parcellaire de l’azote
Avec Spotifarm, vous pouvez réaliser facilement vos cartes de modulation intraparcellaire pour répartir au mieux les doses d’azote en fonction du potentiel de chaque parcelle.
A partir de la dose moyenne de votre apport et du type d’engrais apporté, la répartition se fait de manière automatique en fonction de l’hétérogénéité de la culture.
Si vous n’êtes pas équipés du matériel adéquat pour moduler en automatique aux champs, 2 ou 3 zones peuvent suffire et vous aider à régler manuellement la dose en jouant sur la vitesse de l’épandeur.
5. Moduler en fonction de la forme d’azote
L’efficacité des engrais azotés varie selon leur forme (solide ou liquide).
L’utilisation d’ammonitrate au lieu d’une solution azotée permet en effet de réduire la dose totale, car moins soumis à la volatilisation.
Spotifarm permet de moduler l'azote liquide comme solide.
Pour établir une carte de modulation intraparcellaire d'azote, choisissez la forme d'engrais liquide ou solide dans l'application Spotifarm
6. La pluie joue sur l’efficacité de l’apport
Les engrais minéraux solides seront mieux dissous dans le sol s’il pleut 15 à 20 à mm dans les quinze jours qui suivent l’apport. La plante valorisera au mieux les éléments nutritifs, en particulier pour le deuxième apport (stade épi 1cm).
Pour la solution azotée, éviter de fertiliser en pleine journée. Un temps chaud et du vent peuvent entraîner 20 à 30% de pertes par volatilisation. Il est donc conseillé d’épandre la solution azotée en période pluvieuses.
Radar de précipitations sur l'application de météo agricole Météus
7. Valoriser les engrais organiques riches en azote ammoniacal
Les fientes, le lisier ou les digestats de méthanisation sont des amendements organiques riches en azote ammoniacal, ce qui en fait une bonne alternative aux engrais azotés minéraux, pour le début du cycle notamment.
L’azote des engrais organiques est plus libéré beaucoup plus lentement que pour les engrais de synthèse (plusieurs semaines contre quelques jours). Et la réglementation oblige d’enfouir les effluents après épandage.
Comme pour les engrais minéraux, il est impératif de réaliser les apports dans de bonnes conditions, afin de valoriser au mieux les éléments chimiques.
Les principaux conseils d’apport visent un passage autour du stade épi 1 cm, à réaliser en conditions de portance satisfaisantes, avec un matériel d’épandage limitant les pertes par volatilisation (système d’enfouissement ou, à défaut, pendillards)
La valorisation des engrais organiques permet de réduire sa facture d'engrais
8. Prix de l’azote 📈 x cours du blé 📉 : rechercher l’optimum économique
La méthode des bilans utiliser dans le plan de fumure prévisionnelle pour calculer les besoins des cultures fournit une dose prévisionnelle d’azote correspondant à un optimum technique.
Mais lorsque le prix de l’azote flambe, ou lorsque le cours des céréales est bas, on peut se poser la question de l’intérêt économique de la fertilisation.
En effet, au-delà d’un certain seuil, le coût de l’azote apporté ne sera pas compensé par le gain de rendement. Et les quintaux supplémentaires obtenus peuvent ne pas être rentables …
Nous avons créé un outil de calcul qui permet de simuler la dose totale d'azote pour maximiser vos marges en fonction de ces éléments.
9. Fertilisation PK, pH, soufre … attention aux autres facteurs limitants !
L’efficacité de l’azote sur la croissance de la plante peut être bloquée par d’autres facteurs limitants : pH trop faible, teneurs en PK, etc … D’où l’importance de réaliser des analyses de sol régulièrement.
Vouloir réduire les charges de fertilisation en limitant ou diminuant les apports d’engrais de fonds P et K est tentant mais peut avoir un effet négatif sur les rendements et donc un retour sur investissement négatif.
C’est particulièrement vrai en colza, très exigeant en phosphore et sensible aux carences en soufre.
Certains facteurs limitants peuvent diminuer la valorisation des engrais azotés par la plante
10. Peut-on faire l’impasse sur l’azote ?
En blé : possible au début mais pas en fin de cycle
Beaucoup d’agriculteurs sont tentés de faire une impasse sur leurs apports pour diminuer leurs charges d’engrais azotés. Il est possible de faire des impasses d’azote sur blé, plutôt en début de cycle, surtout si l’hiver a été doux et sec.
Une faible pluviométrie hivernale signifie que l’azote du sol n’aura pas été lixivié (à confirmer avec les reliquats). L’azote encore présent dans le sol peut suffire à la croissance de la culture à une période où les besoins du blé sont encore faibles (le premier apport sur blé tendre de 40-60 kg/ha d’azote est généralement réalisé au stade tallage, à partir de mi-février)
L’économie espérée par cette impasse va de 30 à 60 unités selon la profondeur des terres cultivées.
Attention, il faut un minimum d’épis/m2 pour se permettre de faire cette impasse. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut augmenter la densité de semis. Une densité importante pénalise en effet le tallage (nb de talles/plante), et augmente donc le besoin en azote précoce.
Attention également à ne surtout pas faire l’impasse en fin de cycle.
Nombreux sont les agriculteurs qui pensent que la qualité est insuffisamment payée. Et que par conséquent, le dernier apport peut ne pas valoir le coup, surtout dans un contexte où les engrais azotés flambent.
Mais le dernier apport au stade dernière feuille est celui qui apporte le plus de rendement et de protéines. Une impasse tardive c’est prendre le risque que vote blé soit déclassé car la qualité n’est pas au rendez-vous. Et l’impact négatif sur le prix ne compensera pas les économies d’intrants.
Sur colza, une réduction mal raisonnée des apports d’azote peut coûter cher.
Pas d’impasse ou réduction de dose sans mesure de la biomasse pour le colza ! C’est une des particularités du colza : la réponse du rendement à la dose d’azote est très variée. Ce n’est pas parce que beaucoup d’azote a été absorbé à l’automne et durant l’hiver que le rendement sera bon. Ainsi, un petit colza et un gros colza peuvent finir avec le rendement à la moisson.
A l’idéal, réaliser une estimation du poids de matière fraiche aérienne en entrée et sortie hiver pour évaluer au mieux la quantité d’azote absorbée et donc calculer la dose prévisionnelle d’azote.
La dynamique d’absorption de l’azote par le colza variant très fortement d’une parcelle à l’autre, voire même au sein d’une même parcelle, l’estimation visuelle n’est pas conseillée.
Privilégier des pesées dans les zones homogènes, que vous pouvez repérer facilement avec l’application Spotifarm.
11. Implanter des cultures intermédiaires pièges à nitrates
L’implantation de couverts végétaux en interculture est une solution intéressante de moyen terme qui permet d’enrichir le sol en azote et de faire des économies d’engrais conséquent.
En effet, les engrais verts ou CIPAN (cultures intermédiaires pièges à nitrates) permettent de capter l’azote atmosphérique. Cet azote sera ensuite libéré lors de l’enfouissement du couvert et à disposition de la culture suivante
L’association d’un blé avec un couvert de légumineuse est toutefois déconseillée. C’est une conduite très technique, qui peut s’avérer risquée voire contreproductive du fait de la concurrence possible entre la légumineuse et le blé.
12. Intégrer des protéagineux dans sa rotation
Les protéagineux (pois, lupin…) sont des légumineuses capables de prélever l’azote de l’air et de le restituer dans le sol grâce à leurs nodosités.
Cela en fait d’excellent précédent pour un blé.
On estime que 20 à 50 unités d’azote peuvent être ainsi être économisées selon le type de sol et les conditions climatiques.
13. Investir dans la pesée embarquée
La pesée automatique est un système qui prend en compte le poids des engrais afin de réguler les quantités par rapport à la vitesse d'avancement.
Les systèmes électroniques embarqués permettent ainsi un épandage plus efficace et plus économique sans intervention de l'opérateur sur les réglages qui influencent la dose (écoulement sur les disques, caractéristiques de l’engrais (granulométrie, dureté, densité)).
Tout ces paramètres sont gérés par la pesée en continue de l'engrais dans la trémie du distributeur (voir notre article sur les options des épandeurs)
14. Coupure de tronçon et gestion des pointes
La coupure de tronçon permet d'améliorer la précision de l'épandage en :
- limitant les recouvrements
- évitant les zones de manque dans la parcelle.
- améliorant la régularité de l'épandage
Les gains annoncés par les constructeurs sont de 15% d'économie sur les engrais.
Certains matériel proposent également la coupure automatique en bout de champs et la gestion des pointes, mais ce type de matériel reste onéreux.
15. Optimiser les réglages de l'épandeur
Une bonne qualité d'épandage passe par la qualité des réglages faits au moment de fertiliser. L'idéal est de se fier aux recommandations fournies par le constructeur.
De bons réglages de l'épandeur peuvent vous faire gagner 3% de rendement.
Adapter le débit à la vitesse d'avancement
Les caractéristiques physiques de l'engrais ainsi que les conditions météo d'application influent sur la vitesse d'écoulement du produit dans l'épandeur.
Certains matériels sont équipés de DPA (Débit Proportionnel à l'Avancement) pour une gestion automatisée de ces paramètres sans intervention du chauffeur.
Augmenter la largeur de recouvrement
Augmenter la largeur de recouvrement permet d'augmenter la largeur de travail, c'est à dire la distance entre deux passages de l'épandeur.
Calculer la régularité d’épandage
Au delà de la performance du matériel, l'efficacité de vos apports d'azote passe par un matériel nettoyé et bien entretenu. Le nettoyage est à faire avant et après utilisation, avec un focus particulier sur les pales, les grilles intérieures et la trémie (rouille).
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